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mercredi 2 mai 2007

A la racine

Vous êtes-vous déjà demandé d'où viennent vos choix, vos préférences en matière de musique ? Qu'est-ce qui fait que vous préférez telle chanson à telle autre, tel artiste à tel autre ? J'ai un peu abordé cette question dans le précédent post, mais je voudrais élargir cette question à la façon dont se décident nos goûts. Beaucoup de gens disent que les goûts musicaux se déterminent très tôt. Il est clair qu'il est rare de trouver des gens qui suivent vraiment les évolutions, les tendances nouvelles de la musique. Je suis toujours fasciné par les défricheurs, les John Peel, les Bernard Lenoir, qui continuent à être toujours sur la brèche, sur la nouveauté, alors que passé un certain âge (je sais que John Peel est mort, c'est bon) bien souvent il n'y a au mieux que les disques de leur jeunesse qui peuvent émouvoir les gens.
Je ne suis pas très vieux, cette année j'aurai l'âge du christ à sa mort, mais déjà j'ai l'impression de vivre d'une certaine façon sur des acquis, mes préférences sont bien dessinées et il me semble avoir plus de résistance à la nouveauté. Mais cela étant dit qui peut dire quelle a été la première pierre de l'édifice de nos choix musicaux. Certains soutiennent que dans tout ce que l'on aime c'est une seule et même chose que l'on cherche. Chaque nouvel artiste, chaque nouveau disque qui nous touche répond à cette attente, souvent inconsciente et fondatrice.
A cette étape, il me faut vous raconter un événement assez troublant et important dans la compréhension, ou du moins l'intuition que je possède de ce qui détermine mes goûts musicaux.
Une après-midi d'été, dans mon appart vétuste de l'avenue de Clichy, ma Dulcinée et moi jouions au rami, mollement assis sur la moquette violette. A la radio, réglée sur Inter comme toujours, est passée une chanson qui a tout éclairé. J'étais littéralement chamboulé par ce que j'entendais. Cette chanson que je n'avais jamais entendue, était comme un concentré de tout ce que j'aime. Il me semblait entendre ce qui fait de Tindersticks, Calexico, Lambchop, pour ne citer que les principaux, mes artistes préférés depuis des années. Le plus fort c'était surtout que cette chanson rendait apparents les liens, révélait toutes les similitudes entre ces groupes de façon évidente. Enfin, le son indiquait clairement que cette chanson était antérieure à tous ces artistes et j'ai eu soudain l'impression d'avoir trouvé, identifié, la racine, l'essence de tout ce que je cherche inconsciemment dans la musique.
Vous vous demandez de quelle chanson je parle. Il s'agit de Summer Wine de Lee Hazlewood et Nancy Sinatra.



Depuis lors cette chanson est devenue une chanson fétiche pour ma Dulcinée et moi, et Lee Hazlewood probablement mon artiste préféré. Préféré pour ce qu'il a fait et pour ce qu'il a engendré, pour toutes les pousses que j'écoute et qui m'émeuvent depuis des années.
Moi qui ai longtemps ignoré, voire refusé, les classiques - je n'ai lu Madame Bovary que bien des années après la fin de mes années de lycée - je n'ai jusque tard rien voulu entendre de ce que la musique a produit avant Joy Division et donc avant l'année charnière 79. Il n'y a rien d'étonnant donc à avoir découvert les racines après les pousses. Ma Dulcinée, initiée à la musique par son papa et nourrie de très bonne heure par les Beatles, les Rolling Stones et Bowie, n'a pas de ce genre de surprise, elle a suivi le parcours "classique". L'avantage de cela c'est qu'elle ne s'émerveille pas pour un rien mais l'inconvénient et qu'elle ne se laisse pas facilement surprendre, puisque comme elle a réussi à me le faire admettre, les Beatles ont déjà tout fait.
Comment expliquer que ce qui détermine mes goûts musicaux ne me soit apparu qu'après coup, comme une révélation ? C'est sans doute que j'ai négligé quelque chose. J'ai parmi les quelques vinyles que j'ai acheté ces dernières années toutes les BO de western d'Ennio Morricone : Pour une poignée de dollars, Pour quelques dollars de plus, Le Bon, la brute et le truand, Il était une fois dans l'ouest, Il était une fois la révolution.
Quand j'étais petit, même pas encore adolescent, j'avais un petit électrophone. A l'époque je ne possédais que quelques 45 tours, dont la musique d'Ulysse 31 (si si). Un jour le père de la voisine et amie de ma soeur m'a prêté deux 45 tours, Le bon la brute et le truand, et Il était une fois dans l'ouest. Je crois que c'est là que tout s'est déterminé. Ce n'est que récemment que j'en ai pris conscience. Stuart Staples avoue une passion pour la musique de film et notamment pour Il était une fois dans l'ouest, la musique de Calexico pourrait illustrer de magnifiques westerns, Lee Hazlewood est un vrai cowboy (même en Suède)... Je crois que le point commun de tout ça, la jonction, c'est cette dimension western et un certain penchant pour les orchestrations magistrales.
La route a été très longue pour remonter à la racine, mais voilà, je crois avoir fait le tour et savoir où tout a commencé.

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